samedi 19 mars 2011

LES ASCOMYCÈTES

Les ascomycètes représentent une branche à part dans le monde des champignons. En effet, ils ne ressemblent pas du tout au champignon typique (pied et chapeau). En fait, ils ne se ressemblent même pas entre eux ! On en trouve de toutes les formes (coupes, massue, pastilles) et de toutes les couleurs (jaunes, rouges, oranges, etc.). Ce qui les réunit : la forme de leurs spores, que l'on nomme des asques.

Une des deux seules morilles que j'ai pu cueillir en 2010, une bien mauvaise saison !

Les ascomycètes les plus connus dans le monde sont les truffes, mais rares sont les truffes culinairement intéressantes au Québec. Ici, c'est plutôt la morille qui vole la vedette chez les ascomycètes. La morille ne pousse qu'au printemps (avril-mai, juin plus au nord) et dans des conditions bien précises : sol sablonneux, peupliers, pins blancs, ormes morts. Certains ascomycètes sont de très petite taille, d'où l'importance de prendre son temps lorsqu'on fait une sortie mycologique et de bien inspecter les souches, les troncs et les branches mortes. On y trouve parfois des petits trésors.

Des gyromitres communs à perte de vue !

Il existe un grand nombre de familles d'ascomycètes, certaines étant rencontrées plus fréquemment que d'autres. Au printemps, particulièrement en mai, on retrouve les gyromitres en grand nombre. Ils font partie de la famille des Discinacées. Il existe une dizaine d'espèces de gyromitres au Québec, la plus courante étant le gyromitre commun, Gyromitra esculenta. Le gyromitre, qu'il n'est pas recommandé de manger malgré qu'il était très consommé à une certaine époque pas si lointaine, pousse à la même époque que la morille. On le reconnaît facilement à son chapeau en forme de cerveau, généralement de couleur rouge brique (parfois jaune ou blanc). Il est bien dommage qu'on ne puisse pas les déguster car ils poussent parfois en très grand nombre lorsque les conditions idéales sont réunies !

Ce gyromitre est probablement du variété "gigas"

Une autre famille d'ascomycètes très courante est celle des Hélotiacées. Un de ses plus fidèles représentants étant la pézize citrine, Calycina citrina, qu'on trouve en très grand nombre à la fin de l'été et jusque tard en automne, même après les premiers gels. Elle pousse en grande colonie sur les troncs d'arbres, chaque individu mesurant à peine quelques millimètres. On la reconnaît de loin avec sa belle couleur citron.

La pézize citrine est très commune sur les troncs morts en été et en automne et est facile à reconnaître grâce à sa belle couleur citron

 Un autre membre de la famille des Hélotiacées est la pézize verdissante, Chlorociboria aeruginascens. Si vous ne l'avez pas déjà croisée, vous avez très probablement vu les traces turquoises qu'elle laisse sur le bois mort. Les premières fois qu'on croise ces vestiges turquoises sans champignons, on se demande bien qui est venu peindre ce bout de bois insignifiant au beau milieu de la forêt... jusqu'à ce qu'on rencontre la pézize en pleine maturité, qui est elle aussi d'un beau turquoise.

La couleur de la pézize verdissante rappelle certaines mers du sud...

Une famille d'ascomycètes bien présente mais qu'on ne remarque pas souvent à moins de connaître leur existence est celle des Géoglossacées. Elle regroupe les géoglosses, microglosses et trichoglosses. Les représentants de ces espèces sont le plus souvent noirs et opaques, mais il existe quelques espèces aux couleurs jaunâtres. On les retrouve la plupart du temps au sol ou sur du bois pourri. Ils ont une forme caractéristique de tige qui se termine en petite langue ou en petite massue.

Ce microglosse roux, Microglossus rufum, présente une tête en forme de massue

Un autre groupe bien prolifique d'ascomycètes est composé de pézizes. Les pézizes sont des champignons en forme de coupe, de taille et de couleur très variable selon les espèces, allant du rouge au brun en passant par l'orangé et même le lilas. Elles ont un pied très court ou inexistant. Elles poussent directement au sol ou sur le bois pourri. Il y a même une espèce qui pousse sur les bâtiments (j'en ai d'ailleurs trouvé au creux de mon escalier entièrement en béton l'automne dernier). Plusieurs espèces de pézizes sont comestibles, mais étant donné leur taille souvent petite et la minceur de leur chair, il faut beaucoup de patience pour en cueillir assez pour un repas. Les pézizes sont présentes dans plusieurs familles d'ascomycètes dont les Pézizacées, les Pyronématacées et les Sarcoscyphacées.

La pézize variable, Peziza varia, est commune et peut atteindre de grandes tailles, parfois plus de 10 cm de diamètre, comme dans le cas de celle-ci

La pézize en bouclier, Scutellinia scutellata, est très commune et plutôt de petite taille, dépassant rarement 1 cm de diamètre. Si on la regarde de près, on remarque que son pourtour est orné de poils noirs.

Parmi les autres espèces d'ascomycètes notables, on retrouve la léotie lubrifiée, Leotia lubrica, qui peut ressembler de loin à un champignon plus ou moins typique, mais qui a une consistance gélatineuse, ainsi que la mitrule irrégulière, Neolecta irregularis, une espèce très commune au début de l'automne qui pousse parfois en grand nombre. Les mitrules rappellent les croustilles de maïs Chester et sont comestibles.

La léotie lubrifiée a une texture gélatineuse. Elle est reconnue comme étant toxique.

La mitrule irrégulière se voit de loin avec sa belle couleur jaune vif. Cherchez-la au sol en septembre, notamment sur les tapis d'aiguilles.

mardi 15 mars 2011

LES AMANITES

Les amanites sont un groupe de champignons qui ont bien mauvaise presse au Québec et avec raison. Certaines espèces de ce groupe sont si toxiques qu'une seule bouchée suffit à tuer une personne. N'ayez crainte, ces espèces sont faciles à reconnaître. En fait, tout bon mycologue cueillant au Québec devrait apprendre à reconnaître ces espèces en tout premier lieu et éviter de consommer tout champignon non identifié qui pourrait correspondre à ces descriptions. Malheureusement, plusieurs personnes font fi de ce conseil et il y a régulièrement des cas d'empoisonnements, parfois mortels.

Un bébé amanite vireuse sort de son oeuf

Les amanites sont des champignons très communs au Québec et très colorés. Ils sont, à mon avis, la représentation idéale de ce à quoi devrait ressembler un champignon selon l'imaginaire populaire : un long pied, un grand chapeau parfois orné de flocons, de belles lames. Les champignons les plus couramment représentés ne possèdent-ils pas un chapeau rouge avec des points blancs ? On y reconnaît l'amanite tue-mouche, une espèce haute en couleur... et toxique-hallucinogène !

Une superbe talle d'amanites tue-mouche, très jolies mais toxiques et hallucinogènes

Les amanites possèdent plusieurs caractères typiques, sans être exclusifs ni présents sur chaque espèce : un voile, une volve, des flocons, un pied bulbeux, parfois marginé. Malgré que ce groupe soit connu pour ses espèces hautement toxiques, il contient toutefois quelques espèces comestibles, notamment l'amanite de Jackson (Amanita jacksonii)- la plus belle selon moi, l'amanite fauve (Amanita fulva), l'amanite jaune paille (Amanita sinicoflava), l'amanite rougissante (Amanita rubescens) et l'amanite vaginée (Amanita vaginata). Néanmoins, ne vous risquez pas à les déguster à moins d'être absolument certains de l'espèce.

L'amanite de Jackson dans toute sa splendeur. Jeune, elle pointe son chapeau bien rouge en dehors d'un oeuf tout blanc, la volve.

Cette amanite fauve se reconnaît à sa petite taille, sa volve en doigt de gant, son pied sans anneau et sa marge striée.

On reconnaît les amanites par leurs lames libres. Leur chapeau peut être complètement lisse, garni de flocons ou à marge striée. Lors de l'identification d'une amanite, il est très important de bien observer son pied. En effet, celui-ci permet d'observer des caractères déterminants tels la présence d'une volve ou d'un pied marginé.

L'amanite à voile jaune est souvent confondue avec l'amanite tue-mouche. Bien qu'elles se ressemblent notamment par leur couleur, l'amanite à voile jaune est facile à reconnaître puisque, comme son nom l'indique, son voile est jaune, ainsi que son pied et ses flocons. Son pied est bulbeux et lisse, alors que la tue-mouche a un pied texturé présentant des bandes au-dessus du bulbe.

Il est faux de croire que les champignons consommés par les limaces sont comestibles pour les humains. Malgré l'appétit dont elles ont fait preuve sur cette amanite brunissante, je ne me risquerais pas à y goûter puisque sa comestibilité est inconnue et même suspecte selon McNeil.

Les espèces toxiques à connaître sont l'amanite vireuse (Amanita virosa), très commune, et l'amanite bisporigère (Amanita bisporigera), moins fréquente. Les deux sont de grands champignons entièrement blancs (pied, chapeau, lames, sporée) et sont difficiles à distinguer l'un de l'autre, mais peu importe car ils sont tous les deux également toxiques et mortels, même à petite dose.

L'amanite vireuse, courante dans nos forêts, est entièrement blanche : pied, lames et chapeau. C'est une espèce mortelle qu'on nomme aussi "Ange de la mort".

En terminant, il se peut que vous croisiez de drôles d'amanites qui ressemblent à un long pied avec un chapeau atrophié. Ce sont des amanites qui ont été parasitées par ce qu'on appelle la dermatose des amanites (Hypomyces hyalinus).

On se pose bien des questions la première fois qu'on observe une amanite parasitée !

dimanche 13 mars 2011

LES PLEUROTES

Les pleurotes sont des champignons bien connus du grand public. On les trouve non seulement en forêt, mais aussi en épicerie car ils font l'objet de culture commerciale. Le plus fidèle représentant de l'espèce est certainement le pleurote en huître, Pleurotus ostreatus. À mon avis, les pleurotes sont parmi les meilleurs champignons sauvages comestibles et se classent facilement dans mon top 3.

Les pleurotes en huître sont probablement les pleurotes comestibles qu'on rencontre le plus couramment. On les reconnaît facilement à leur odeur d'anis. Ceux-ci étaient infestés d'insectes qui voulaient les dévorer... mais c'est moi qui ai gagné cette fois-là !

Les pleurotes sont distribués dans deux familles distinctes, soient les Pleurotacées (genre Pleurotus) et les Tricholomatacées, une famille très variée (genres Hypsizygus, Sarcomyxa et Pleurocybella, entre autres).

Les pleurotes étalés, Pleurocybella porrigens, ou encore Angel's wings en anglais, sont faciles à reconnaître par leur blancheur éclatante, leur petite taille et leur délicatesse.

Le pleurote tardif, Sarcomyxa serotina, pousse tard à l'automne. Il se reconnaît à ses lames jaunâtres et son chapeau olive collant. Il est comestible à condition de gratter la pellicule qui recouvre le chapeau.

On reconnaît les pleurotes au fait qu'ils poussent sur les arbres et qu'ils ont la plupart du temps un pied excentré, souvent court, parfois inexistant. Ils possèdent souvent des lames décurrentes, c'est-à-dire qu'elles descendent sur le pied. Ils poussent généralement en touffes. On retrouve des pleurotes du printemps jusqu'à tard en automne, mais toutes les espèces ne sont pas comestibles. Toutefois, aucune n'est toxique ni dangereuse.

Le pleurote tesselé, Hypsizygus tessulatus, se reconnaît facilement à ses taches d'eau qui ornent le chapeau. C'est un bon comestible qu'on retrouve en automne.

Soyez aux aguets, si vous détectez une odeur d'anis dans la forêt, vous êtes peut-être près d'une belle talle de pleurotes. Si vous connaissez des endroits où poussent les pleurotes, pensez à vous munir d'un très grand panier et d'un long bâton au moment de la cueillette. En effet, on trouve souvent des pleurotes en hauteur et la cueillette peut être très fructueuse car ils poussent souvent en grand nombre !

En matière de mycologie, tout est une question de timing ! Arrivée quelques jours plus tôt, j'aurais pu faire une excellente récolte. Malheureusement, les pleurotes étaient vieux et infestés d'insectes au moment où je suis passée.